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Pour que les menstruations débordent de nos bobettes

Article spécial dans le cadre de la
Journée mondiale des nettoyages

Mis en ligne le 22 avril 2022

Écrit par Tina Laphengphratheng

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Pour le Jour de la Terre, l’Organisation Bleue est fière de collaborer avec Mme l’Ovary pour sensibiliser à la réduction de consommation de plastique, dont notamment l’utilisation d’articles d’hygiène féminine à usage unique. Partout à travers la planète, les menstruations demeurent dans la sphère privée. Et pourtant, elles débordent de nos culottes.Une petite lecture pertinente en cette journée pour la planète!

 

*Le mot « femme » est employé ici pour alléger le texte, mais il concerne toutes les personnes ayant un utérus.

Pour que les menstruations débordent de nos bobettes

Partout à travers la planète, les menstruations demeurent dans la sphère privée. Et pourtant, elles débordent de nos culottes. L’éducation à la sexualité, l’accès à l’information, à des soins gynécologiques, à des articles d’hygiène féminine et la possibilité de faire des choix de consommation responsables et éclairés sont l’affaire de toutes et de tous. Que ce soit socialement, environnementalement ou politiquement, il faut les décloisonner.

Nos menstruations et la société

J’ai treize ans. Au restaurant, mes premières menstruations. Sur ma jupe, à la hauteur de mes fesses, une auréole rouge vif. Ma mère sort du restaurant, court devant la vitrine, revient avec son foulard resté dans la voiture. Me commande de l’attacher autour de ma taille. À tout prix, cacher le sang.

 

Jeunes, nos mères nous ont appris à dissimuler nos menstruations. À les cacher dans la salle de bain, là où personne ne les voit. À camoufler nos douleurs sans jamais les partager. Il faut subir ses menstruations sans que quiconque ne s’en aperçoive. Nos mères, tout comme nous, ont hérité des menstruations comme d’une honte.

«
Nos mères, tout comme nous, ont hérité des menstruations comme d’une honte.
»

Dans toutes les publicités, le schéma se répète. La protection hygiénique permet aux femmes de réaliser des prouesses olympiques : ski, équitation, escalade, voile, basket. Les représentations semblent diversifiées, mais elles véhiculent toutes le même message. Les serviettes hygiéniques et les tampons sont magiques pour nous. Ils nous donnent le pouvoir de faire tout ce qu’on voit à la télévision. Et si le paradigme changeait ?

 

Et si, enfin, on recevait une image des menstruations qui correspond davantage à la réalité, avec des femmes recroquevillées dans leur lit, sans brassière pour libérer les mamelons sensibles, des femmes avec un sac magique sur le ventre ou encore des femmes à l’urgence parce que leurs menstruations sont hémorragiques. Pourquoi est-ce qu’on ne livrerait pas une image dérangeante, choquante, inquiétante et fidèle des menstruations?

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Nos menstruations et la planète

Avoir des menstruations n’est pas un choix. Mais nous pouvons choisir nos produits menstruels. 

 

À treize ans, deux options s’offraient à moi : le tampon et la serviette jetable. En plus d’accumuler les déchets menstruels dans la poubelle, ma mère m’avait appris à envelopper d’autant de couches de papier de toilette nécessaires les articles souillés. Encore une fois, à tout prix, même au profit de la planète, cacher le sang.

 

Aujourd’hui, d’autres options existent. Elles ne sont pas encore partout, mais elles sont là. La coupe, les culottes menstruelles, les serviettes lavables ont les avantages d’être réutilisables, accessibles, confortables et saines pour nos corps. Réduire notre consommation de tampons et de serviettes, c’est réduire de manière considérable notre production de déchets. Les applicateurs en plastique sillonnent le monde par les océans, se désagrègent, s’immiscent et polluent les berges, la végétation, l’air que nous respirons. On le sait, mais on demeure aveugle. Et ce n’est pas sexy des déchets alors que la championne olympique nous montre comment Tampax lui permet de briser des records à la télévision. Au cours d’une vie, c’est anéantir 12 500 articles d’hygiène féminine[1]. Parler de ces solutions et de ces impacts dévastateurs à nos amies, nos mères, nos élèves (et à des inconnues, pourquoi pas!) c’est veiller sur nos premières maisons : la terre et le corps.

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Nos menstruations sont politiques

Mettre en place des lois pour soutenir les besoins spécifiques des personnes menstruées — et je pense à toutes sortes de besoins tels que des congés au travail, des toilettes chimiques avec du savon et de l’eau (parce qu’on ne peut pas vider sa coupe les mains pleines de Purell), des descriptions de produits menstruels réglementés où nous savons ce que nous mettons dans nos corps, des culottes sans alkyls perfluorés et polyfluorés (PFAS), etc. — sont des changements urgents à apporter.

 

Il reste de l’espoir. Au Québec, de plus en plus de villes remboursent une partie de l’achat de produits menstruels durables pour réduire l’enfouissement de déchets, une procédure coûteuse pour nos municipalités[2].

«
Un monde sans tabou, où parler de menstruations est aussi banal que de parler de la température
»

D’infimes espoirs comme celui-ci en nourrissent d’autres. Celui d’un monde sans tabou, où parler de menstruations est aussi banal que de parler de la température. De femmes qui nettoient leur coupe menstruelle dans les toilettes publiques sans gêne. D’éducation à la sexualité et surtout, d’éducation concernant le rapport que nous entretenons avec notre corps. D’une conscience écologique qui s’invite dans nos pantalons. Bref, de menstruations qui débordent dans toutes les sphères de la vie.

 

Renversons les rapports de pouvoir exercés sur nos corps et sur notre planète. 

Choisir consciemment de vivre nos menstruations sans plastique, c’est gagnant! 

 

En ce Jour de la Terre, disons non merci au plastique dans nos océans et  nos bobettes ;)

 

#sangdéchet

[1] Donnée prise sur la campagne #sangdéchet de Mme l’Ovary

[2] Donnée prise sur la campagne #sangdéchet de Mme l’Ovary

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